En 2006, six réalisateurs
espagnols se sont conjointement associés afin de produire et de
mettre en scène six longs-métrages réunis sous la bannière
Películas Para no Dormir.
Parmi lesquels, Jaume Balagueró et Álex de la Iglesia. Depuis, ce
dernier a créé une nouvelle anthologie intitulée The
Fear Collection et
qui dès 2020 a fait l'objet d'un long-métrage qu'il a lui-même
réalisé sous le titre Veneciafrenia.
L'année suivante, Jaume Balagueró a pris la relève et à signé
quant à lui Venus.
Il aura fallut patienter deux années supplémentaires pour voir
débarquer Anatema
de Jimina Sabadú. Première réalisatrice espagnole de sexe féminin
à participer à ce type de projet réunissant jusque là des
cinéastes masculins, la quadragénaire signe avec ce premier
long-métrage, un film d'horreur qui n'a absolument pas à rougir
face à la concurrence masculine. Bien au contraire. Toujours produit
par Álex de la Iglesia et par Carolina Bang avec laquelle ce dernier
avait déjà produit les deux précédents films de cette collection
que l'on espère voir durer dans le temps, Anatema
met en scène une religieuse du nom de Juana Rabadán (Leonor
Watling) qui sur demande de l'archidiocèse accepte de retourner dans
la ville de son enfance afin d'élucider le mystère qui entoure
plusieurs morts ayant eu lieu dans une église du vieux Madrid. Après
une scène d'ouverture étonnante et ne laissant planer aucun doute
quant à la présence du Mal en ce lieu Saint, les différents
protagonistes du récit se réunissent autour de cette affaire
religieuse particulièrement angoissante qui semble-t-il, aurait
débuté au moment même où une équipe d'électriciens chargés
d'effectuer des réparations dans l'église aurait ouvert par mégarde
une crypte jusque là condamnée. L'on retrouve donc autour de
l'actrice, Pablo Derqui et Jaime Ordóñez, dans les rôles
respectifs des Pères Angel et Cuiña, ainsi que Keren Hapuc dans
celui de sœur Mara. Ce carré de personnages devra accepter de
confronter ses propres craintes afin de pénétrer la crypte dans ses
plus profondes fondations. Là où le Mal s'est tapi. Extirpant ainsi
par erreur un sceau qui retenait jusque là les suppôts du démon qui
désormais vont pouvoir sortir au grand jour.... Sauf que, ben en
fait, non, pas du tout. D'ailleurs, ceux-ci nous ont montré dès le
début qu'ils étaient en mesure de le faire malgré la présence du
''scellé'' en question. Tourné à Madrid et à Biscaye dans la
province du nord de l'Espagne, certains plans de Anatema
ont en outre été précisément tournés dans les Grottes de
Pozalagua.
Ces
scènes figurent les immenses fondations de l'église dont les
diverses parties visibles de l'extérieur ne sont, comme l'indique
l'un des protagonistes du récit, que la partie émergée de
l'iceberg ! Le principal atout de l'intrigue, ce sont bien évidemment
ses interprètes, lesquels entrent en une parfaite communion dans
cette enquête religieuse parfois passionnante. Également
scénariste, Jimina Sabadú insiste surtout sur le personnage de
Juana Rabadán, une restauratrice de talent au fort caractère dont
l'ancien époux s'est suicidé suite à son emprise par un démon
pourtant chassé lors d'un exorcisme. Pour couronner le tout, le
frère de la religieuse, Miguel (Mauro Brussolo) est cloué dans l'un
des lits du Monastère où vit désormais sa sœur et possède le don
d'être, comme les Saints, à deux endroits en même temps! La
réalisatrice ne demeure pas moins consciente de l'importance des
personnages qui orbitent autour de son héroïne et chacun d'entre
eux est parfaitement campé. Malheureusement, le long-métrage n'est
pas exempt de défauts. En effet, si toute la partie qui concerne
l'enquête du quatuor est particulièrement convaincante, tout ou
partie des interventions démoniaques frise le ridicule. Leurs
diverses représentations apparaissent avec la hâte d'un enfant
pressé de s'amuser avec ses nouveaux jouets. Quant à l'apparence de
certains d'entre eux, là, rien de vraiment original puisque la Nonne
Blanche incarnée par Laura Sánchez a tout de l'allure grossièrement
dessinée de celle produite par l'univers Conjuring
et mise en avant dans The
Nun
de Corin Hardy en 2018. Ajoutant à cette apparition grotesque,
quelques ''gargouilles'', une version noire de la nonne à travers le
Diablo
Negro Rocco (interprété
par Christian Pérez) et quelques joyeusetés supplémentaires comme
des bandages constitués de boyaux humains prenant vie ou encore une
créature au corps parcheminé de visages agonisants (une idée
probablement pompée à l'un des longs-métrages de la franchise A
Nightmare on Elm Street).
De bonnes idées pour un combat final qui paraît extrêmement
faiblard au regard des ambitions scénaristiques. Bref, Anatema
vaut surtout pour l'investigation de ses quatre héros dans ce qui
constitue une porte ouverte vers l'Enfer. Mais une fois arrivés à
l'intérieur, c'est pour le spectateur, une véritable douche
froide...