
Dix ans plus tard,, Mardet tue au nom du Seigneur auquel il est entièrement voué. Mais pas n'importe qui. Ceux qui comme lui, dix ans plus tôt, souffrent. Qu'il s'agisse d'un clochard, ou bien d'un homme qui a perdu toute sa famille dans une noyade, tous y passent. Ce dernier justement, Mardet l'a tué mais n'a pas tenté de camoufler le corps. Plus absurde encore, il a téléphoné à la police afin de la prévenir de la présence du cadavre dans son jardin. Moreau et Castan sont les deux inspecteurs chargés de l'enquête. Le premier est très vite convaincu de la culpabilité quand le second, lui, préfère émettre des réserves...
Je n'en dirai pas davantage pour ne pas dévoiler la totalité du contenu de ce récit qui aurait pu, et aurait même dû donner naissance à un bon polar à la française. Mais Jean-Pierre Mocky s'étant chargé de la réalisation et du personnage de Jean Mardet, on se doute bien que son adaptation ne va pas atteindre des sommets en matière de mise en scène et d'interprétation. Il demeure pourtant dans son cinéma, quelque chose d' éminemment touchant. Un détail par-ci, par-là qui nous fait aimer ce personnage unique (ou presque) dans le paysage cinématographique français. On s'indignerait presque que personne ne veuille distribuer ses films. Car en effet, comme pour beaucoup de ses œuvres, La Bête de Miséricorde n'est sorti en France le 17 octobre 2001 que dans une seule et unique salle, la sienne. Celle de Jean-Pierre Mocky, le BRADY. Il est demeuré vingt-six semaines en exclusivité. La première, il a totalisé 608 entrées. Et à la fin, il n'en aura finalement récolté que 6207. C'est peu, et en même temps, pas très étonnant.
Parce que Jean-Pierre Mocky a eu beau tourner avec certains de nos plus grands acteurs (Francis Blanche, Bourvil, Jean Poiret, Fernandel, Michel Serrault, Jacques Dufilho, Michael Lonsdale, etc...) et même des personnalités « travaillant »dans d'autres secteurs artistiques (Charles Aznavour, Eddy Mitchell, etc...), son cinéma arbore un visage assez particulier. Lui qui a pour habitude d'employer des « gueules cassées » fait également régulièrement appel à de véritables amateurs. C'est le cas ici. Ce qui ne l'a pas empêché d'offrir deux des principaux rôles à Jacky Berroyer et Bernard Menez. Si le premier s'en sort avec les honneurs, le seconds est terriblement mauvais. C'est à se demander de quelle manière Bernard Menez est parvenu à se bâtir une filmographie d'environ cent films. Se reprenant à plusieurs reprises, on se demande dans quelle mesure il a appris son texte et quelle est la part d'improvisation des interprètes. D'ailleurs, lorsque gît le cadavre de Moreau à la fin du film (oui, je sais, je spoile), on se dit que Bernard Menez est meilleur lorsqu'il se tait que lorsqu'il tente vainement de donner du corps à son personnage d'inspecteur de police.
A part cela, La Bête de Miséricorde se situe au niveau qualitatif, au beau milieu de la filmographie de son auteur. Ni parmi ses meilleurs longs-métrages, mais heureusement, pas non plus parmi ce qu'il a réalisé de plus mauvais. L'honneur est donc relativement sauf. Ouf !