Question : quel est selon vous le meilleur Found Footage
toutes origines, tous genres et toutes époques confondus ? Le
projet Blair Witch des
américains Daniel Myrick et Eduardo Sánchez ? [REC]
des
espagnols Jaume Balagueró et Paco Plaza ? La science-fiction de
Cloverfield
signée de Matt Reeves ? Ou les anthropophages de Cannibal
Holocaust
de l'italien Ruggero Deodato ? Réponse : aucun d'entre
eux. Non, le plus grand film en la matière nous vient d'Asie. Du
Japon pour être plus précis. Et le plus dingue dans toute cette
histoire, c'est que le film en question reste méconnu. Réalisé
par l'ultra-prolifique Kôji Shiraishi qui entre trente-cinq ans de
carrière a déjà près de cent réalisations à son actif, le
bonhomme peut se vanter d'avoir signé en 2005, non seulement le
meilleur Found
Footage de
l'histoire du genre mais sans doute également l'un des plus grands
films dans la catégorie J-Horror.
Oubliez tout ce que vous connaissez en terme d'épouvante. Noroi
les surpasse tous avec une telle aisance que son auteur a de quoi
rendre jaloux n'importe quel cinéaste amateur et professionnel
spécialisé dans le cinéma d'horreur. Non seulement son film est la
réponse asiatique au projet Blair Witch que
d'aucun considère comme l'un des grands classiques du genre, mais il
a le culot d'en reprendre la plupart des codes tout en les sublimant.
Sur près de deux heures, Kôji Shiraishi développe un concept
connu mais avec une telle maestria qu'au final, Noroi
ne peut que devenir la nouvelle référence en la matière ! Le
procédé est on ne peut plus simple : filmé caméra à
l'épaule, le long-métrage suit les investigations de Masafumi
Kobayashi (incarné par l'excellent Jin Muraki). Un chasseur de
fantômes, de mauvais esprits (ici, un certain Kagutaba), un
spécialiste du paranormal qui enquête sur la disparition d'une
gamine et sur une série d'événements a priori sans liens
apparents. Des hommes et des femmes qui se suicident. Un homme qui
tue son épouse. Des pigeons qui viennent s'écraser contre une
vitre. Des chiens retrouvés éventrés. Une vieille femme sénile
difficile à approcher. Un hurluberlu qui vit chez lui entouré
d'aluminium. Tout commence par l'évocation d'un drame qui vient de
toucher Masafumi lui-même puisque sa maison a pris feu et que son
épouse a été retrouvée carbonisée. Quant à lui ? Aucune
trace. Personne ne sait ce qu'est devenu celui qui pourtant sera au
centre de l'un des films d'horreur japonais parmi les plus
remarquablement flippants ! Car comme dans tout bon Found
Footage,
le concept repose sur le visionnage de bandes-magnétiques suivant la
disparition de son propriétaire.
Car
durant ses recherches, accompagné de son cameraman, Masafumi va tout
filmer. Des différents entretiens qu'il aura avec les voisins les
plus proches de certains personnages centraux du récit. Comme cette
étrange femme du nom de Junko Ishii (Tomono Kuga), laquelle est
rapidement soupçonnée comme étant un élément clé dans la
disparition d'une gamine d'une dizaine d'années dont on n'a pas
retrouvé la moindre trace. L'un des aspects les plus remarquables du
scénario que Kôji Shiraishi a écrit à cette occasion aux côtés
de Naoyuki Yokota est le très large panel d'événements que les
deux hommes vont déployer. Ce qui peut, dans une moindre mesure mais
sur un temps qui pourrait en décourager certains, faire perdre le
fil du récit à une partie plus ou moins importante des spectateurs.
D'autant plus que le film étant d'origine asiatique, il se peut que
l'on se perde tout d'abord entre le nom des uns et des autres. Il va
donc falloir s'accrocher mais aussi et surtout, se concentrer sur la
moindre petite parcelle de l'histoire. Car si la série d'événements
relatés par les médias ou à travers de fugaces plans filmés par
notre héros ne semblent avoir que peu de chose en commun, le
spectateur aura tout loisir de découvrir qu'en réalité tout est
lié. Le montage nerveux et parfaitement étudié de Nobuyuki
Takahashi permet une lecture plutôt clair et réaliste des
événements malgré la forte impression d'être noyé sous une somme
d'informations faussement indigeste ! Accompagné d'une musique
sobre, minimaliste mais anxiogène, Noroi mène
ses personnages et donc les spectateurs aux confins de l'effroi.
Réduisant presque la plupart des séquences forestières du projet
Blair Witch
au simple statut de promenade champêtretant
le japonais parvient à rendre terrifiante cette traversée nocturne
qui survient lors du dernier tiers du long-métrage. Bien entendu,
tous les éléments dispersés durant le récit finissent par
s'amalgamer afin de mettre à jour la réalité de cette séries
d'événements relatés depuis le tout début du récit. Noroi
est un très intelligent compromis entre investigation paranormale et
film d'épouvante cauchemardesque. Bref, les amis, si vous ne l'avez
toujours pas vu, un seul conseil : Ruez-vous dessus... !!!