Le réalisateur
sud-coréen Bong Joon Ho fait partie de ces cinéastes sur lesquels
on peut généralement compter si l'on désire passer un très
agréable moment devant un long-métrage pétri de qualités.
Prouvant ainsi durant une bonne partie de sa carrière qu'il fut
capable d'aligner des œuvres parfaitement maîtrisées (Memories
of Murder,
Mother,
Snowpiercer),
allant même jusqu'à conquérir les États-Unis et le monde entier
en remportant une foule de prix comme l'Oscar du meilleur film, du
meilleur scénario ou du meilleur réalisateur aux Oscars 2020 ou
bien la Palme d'Or au festival de Cannes un an auparavant pour
Parasite.
Entre 2019 et 2025, c'est le silence radio dans les salles de cinéma.
Six années au cours desquelles le cinéaste participe malgré tout à
l'élaboration de quarante et un épisodes de la série Snowpiercer
adaptée de son propre long-métrage réalisé quant à lui en 2013.
C'est donc avec une joie non mesurée qu'était attendu son Mickey
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qui, sans vouloir faire la nique en comparant sa sortie avec celle de
la nouvelle version de Blanche-Neigeétait un moyen parfaitement tronqué d'aller voir une œuvre portant
le nom de l'un des plus illustres personnages créés par Walt
Disney ! Sauf qu'ici, celui incarné par Robert Pattinson n'a
rien d'une grande et joviale souris au pantalon rouge et court et aux
grandes oreilles noires mais affiche plutôt un air bêta, naïf et
donc forcément attachant ! C'est vrai, quoi. Celui que l'on ne cesse
généralement de comparer au rôle qu'il tint durant la quintologie
Twilight
est ici présent derrière le masque d'un jeune homme qui ne semble
pas vraiment avoir sa place dans un monde futuriste situant son
action en 2054. Fuyant les emmerdes qu'il a contracté sur Terre
après avoir suivi les conseils plus ou moins avisés de son seul et
donc meilleur ami Timo (l'acteur Steven Yeun, devenu mondialement
célèbre grâce au rôle de Glenn Rhee dans la série The
Walking Dead
entre 2010 et 2016), Mickey a pour projet de faire partie du prochain
équipage à destination de la planète glacée Niflheim. Mais
nombreux sont les candidats et pour être bien certain d'en faire
partie, le jeune homme accepte de signer un contrat de travail dans
lequel il sera employé en tant que ''Remplaçable''. Sachant par là
même qu'il servira désormais de cobaye lors de missions dangereuses
(comme celle de tester l'atmosphère de la planète Niflheim à
l’atterrissage du vaisseau, par exemple). Mais alors qu'il mettra
son existence en danger, une technologie future permettra de le
réimprimer. Sorte de clonage en mode 2.0 qui semble avoir été très
fortement inspiré par la technologie consistant à employer les
imprimantes 3D.
Sauf
qu'ici il s'agit bien d'un individu dont on a conservé la mémoire,
laquelle est directement réinjecté dans le cerveau du nouveau
Mickey qui vient alors prendre la place du précédent. L'on comprend
alors le sens du titre Mickey 17. Énième
itération d'un individu qui croisera pour l'occasion, son clone
nommé Mickey 18 alors que tout le monde est persuadé qu'il est mort
lors d'une chute dans une crevasse à la surface de Niflheim.
Message plus ou moins grossier visant directement le président
américain Donald Trump (Mark Ruffalo incarne un Kenneth Marshall
très caricatural allant sans doute dans ce sens), Mickey
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se veut non seulement être une comédie de science-fiction mais
aussi une critique acerbe de la politique américaine. Dans sa grande
générosité, Bong Joon-ho adapte le roman éponyme d'Edward Ashton
sorti trois ans plus tôt et fourre dans son œuvre tout ce qui lui
passe par la tête. De quoi, sans doute, justifier la durée du
long-métrage qui approche les cent-quarante minutes. Ce qui en soit
n'est pas un exploit vu que de nos jours, certains films côtoient
sans complexe les trois heures ! Un film long, donc, mais aussi
et surtout, malheureusement, assez pénible à suivre jusqu'à son
terme. Car si l'entrée en matière est plutôt sympathique et laisse
transparaître une œuvre ambitieuse, divertissante et bourrées de
bonnes intentions, le résultats n'est pas du tout à la hauteur. Le
problème étant justement que le réalisateur sud-corén en fait
beaucoup trop ! Chargeant la mule jusqu'au ras de la gueule,
l'indigestion est assurée. Dans un univers grisâtre qui peut
parfois rappeler celui du chef-d’œuvre de Terry Gilliam, Brazil,
les décors de Fiona Crombie n'en sont pas pour autant tout aussi
remarquables. C'est terne, triste, répétitif et donc peu engageant.
Les effets-spéciaux sont tout juste corrects et rappellent parfois
ceux de Okja
que réalisa justement Bong Joon-ho en 2017. Ses rampants semblant
provenir d'un film d'animation pour enfants, Mickey
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ne risque pas d'effrayer grand monde. Comme il ne prend pas davantage
le risque de faire rire lors d'un récit où notre héros rencontre
l'amour tant l’œuvre se disperse à travers des situations et des
lignes de dialogue inintéressantes au possible. Bref, le film est
une grosse déception qui coche toutes les cases de l’œuvre
stérile dénuée de toute charge émotionnelle. Reste pourtant la
formidable partition du compositeur sud-coréen Jung Jae-il qui après
sa participation à Parasite
signe ici une œuvre souvent magnifique...